La psychiatrie, ça fait très peur, c'est un monde obscur où dominent les forces du mal, un monde inconnu, bizarre, certainement très dangereux, les psychiatres ont tous l'air plus fous que leurs patients...
Toi même lecteur, je crois deviner que tu n'es pas loin de penser que la psychiatrie est peuplée de malades sanguinaires soignés par des docteurs mabouls et des infirmiers qui passent leur temps à boire du café...
Non?
Il y a tellement de non dits et d'ignorance autour de la psychiatrie, d'incompréhension aussi, que l'on peut vivre des histoires surréalistes .
Sache lecteur, que pour n'importe quel service de l'hôpital général, "malade psy"= patate chaude, je veux dire par là malade en transit, à ne surtout pas garder, car potentiellement dangereux et/ou annonciateur de troubles.
Ceci même si le malade en question a 90 balais, est grabataire avec un fièvre à 40° et un parkinson...
L'étiquette "psy" est encollée à la superglue, quand tu l'as, impossible de t'en débarrasser, même avec le super anti-adhésif dernier cri, non non, l'étiquette psy est une coriace, elle résiste à tout.
Elle te catalogue le malade mieux qu'une pub de la Redoute, elle est un tatouage virtuel mais néanmoins indélébile, et ceci jusqu'à la mort du patient.
A cause d'elle, nos patients ne sont pas les bienvenus dans les services de soins généraux et y sont souvent "sous traités".
A cause d'elle, nos patients vieillissants se voient refuser l'accès aux maisons de retraite: "ah bah non, c'est un psy, trop difficile à gérer."
( Les mêmes maisons de retraite pouvant accueillir sans sourciller des papys complétement déments qui sont capables de mettre le bronx en deux temps trois mouvements...)
A cause d'elle, la réinsertion de nos patients stabilisés est souvent délicate: trouver un logement, un travail, relève du parcours du combattant....
Et puis, l'étiquette psy est contagieuse, les infirmiers l'attrapent aussi:
Pour eux aussi, ce n'est pas facile, parce que quand tu as été contaminé, tu dois te faire à l'idée que tu as quitté le monde sérieux des "vrais" infirmiers.
C'est bien connu, l'infirmier, en devenant psy, perd une partie de ses facultés mentales, ne sait plus travailler, s'affole pour une broutille somatique, et considère que son boulot consiste essentiellement à boire le café en fumant sa clope....
D'ailleurs, soyons sérieux, comment peut on se prétendre infirmier quand nos demandes de formation se nomment art-thérapie, équithérapie, contes, psycho-corporel, relation d'aide, et autres dénominations farfelues...